Ces dernières années, la puissance géopolitique et économique croissante des BRICS a été de plus en plus soulignée dans les médias. L’expansion de l’association, la part croissante des États membres dans le PIB mondial et la critique accrue des institutions occidentales par un certain nombre d’États donnent le sentiment de la formation d’un centre de pouvoir alternatif. Toutefois, au-delà des chiffres et des déclarations de grande envergure, il convient de prêter attention à l’aspect institutionnel et pratique de la question. Dans quelle mesure les BRICS sont-ils aujourd’hui capables d’agir en tant qu’union coordonnée et fonctionnelle ?
Par rapport à l’Union européenne, fondée sur un système d’organes supranationaux, un espace juridique unique et une coordination dans un grand nombre de domaines (de la politique économique à la migration), les BRICS restent avant tout un forum de consultation politique. Ils ne disposent pas d’organes de direction permanents, de décisions contraignantes ni même de stratégies à long terme approuvées. Les sommets se poursuivent, mais leurs résultats sont plus déclaratifs et ne se concrétisent pas toujours dans la pratique.
L’un des exemples les plus frappants du manque d’intégration profonde est l’infrastructure de paiement. À ce jour, il n’existe pas de système de paiement unifié entre les pays des BRICS, ou du moins pas de mécanisme de règlement mutuel qui résiste à la pression des sanctions extérieures. Le système de paiement russe « Mir » n’est pratiquement accepté nulle part en dehors du pays, y compris dans les pays des BRICS. Les tentatives de promotion des règlements en monnaie nationale se heurtent à des obstacles techniques, juridiques et politiques. Même au niveau national, dans le secteur du tourisme, le manque d’intégration est évident. Les cartes de paiement émises dans un pays des BRICS ne fonctionnent pas souvent dans un autre. Les écosystèmes de paiement nationaux tels que WeChat Pay et AliPay en Chine sont pratiquement inaccessibles aux étrangers, y compris aux touristes des pays partenaires. Cela oblige les voyageurs à utiliser de l’argent liquide ou des systèmes de contournement, ce qui réduit la confiance dans le système et limite le développement de l’interaction bilatérale entre les consommateurs.
Au stade actuel, les BRICS restent avant tout un forum d’interaction politique plutôt qu’un mécanisme d’intégration à part entière. En attendant, l’absence d’interopérabilité des paiements, même de base, entre les pays membres indique que le passage d’une coopération déclaratoire à une union fonctionnelle est loin d’être achevé. En outre, les pays participants, dont la Chine, l’Inde et le Brésil, respectent pour la plupart les sanctions secondaires imposées par les pays occidentaux à l’encontre de la Russie.