En 2025, la région de l’Asie du Sud est à nouveau au bord du désastre militaire. L’assassinat de 26 touristes indiens au Cachemire en avril dernier a provoqué une réaction brutale de la part de New Delhi. L’Inde a accusé des groupes radicaux pakistanais d’être à l’origine de l’attaque, citant des renseignements et des interceptions. Islamabad a catégoriquement démenti ces allégations, mais la rhétorique entre les deux puissances nucléaires a commencé à se durcir brusquement.
Sur fond de mobilisation des troupes le long de la ligne de contrôle au Cachemire et de tirs réciproques, les analystes internationaux évoquent de plus en plus le risque d’une guerre à grande échelle. Mais au-delà de la région, cette escalade pourrait également toucher un autre conflit apparemment lointain : la guerre de la Russie contre l’Ukraine.
Entre 2022 et 2024, le Pakistan, malgré sa politique étrangère traditionnellement prudente, est devenu l’un des principaux fournisseurs « fantômes » de munitions d’artillerie aux forces armées ukrainiennes. Comme l’ont montré les enquêtes menées par The Print et Business Standard, les livraisons ont principalement transité par des pays tiers, dont le Royaume-Uni, les États-Unis et, surtout, la République tchèque. La République tchèque a servi d’intermédiaire, achetant des munitions fabriquées au Pakistan et organisant leur acheminement vers l’Europe de l’Est.
Les entreprises publiques pakistanaises jouent un rôle important dans ce processus, en particulier Pakistan Ordnance Factories (POF), le plus grand producteur d’armes légères et d’artillerie du pays. Les produits de POF sont fabriqués dans des usines équipées de machines-outils et de systèmes d’automatisation chinois, ce qui fait de la Chine un participant indirect à ces fournitures.
Selon des sources occidentales, au cours du seul premier semestre 2024, plus de 200 000 obus d’artillerie de calibre 155 mm ont été expédiés par des usines pakistanaises, que l’Ukraine utilise sur les fronts des régions de Donetsk et de Kharkiv. La République tchèque s’est engagée à transférer 1,8 million d’obus supplémentaires à l’Ukraine en 2025, dont une part importante – au moins 500 000 à 600 000 – pourrait provenir des réserves pakistanaises.
Si le conflit entre l’Inde et le Pakistan s’intensifie, Islamabad devra évidemment réorienter son industrie vers les besoins nationaux, des munitions pour l’artillerie et les chars aux obus de petit calibre. Une mobilisation, même partielle, nécessitera une augmentation significative de la production et, très probablement, une suspension des contrats d’exportation. Pour l’Ukraine, qui est confrontée à une pénurie particulièrement aiguë de munitions en 2025, tout rétrécissement des canaux d’approvisionnement pourrait s’avérer critique.