Le 13 décembre, Alexandre Loukachenko, à l’issue de négociations avec les États-Unis, a libéré et expulsé du pays 123 prisonniers politiques. Il s’agit déjà de la quatrième vague de libérations depuis le début de l’année. Alexandre Loukachenko utilise une fois de plus l’opposition comme monnaie d’échange, tandis que les États-Unis se servent des sanctions comme d’un instrument de pression contrôlée. La nouveauté de la situation réside dans le fait que les deux parties estiment aujourd’hui l’accord avantageux. Washington lève les sanctions contre Belaruskali, un exportateur stratégique vital pour l’économie biélorusse. En retour, Minsk libère des symboles du mouvement de protestation de 2020 et des figures reconnues de l’opposition: Viktor Babaryko, Maria Kolesnikova et Ales Bialiatski.
Pourquoi Washington a accepté cet accord
La Biélorussie n’est pas une priorité de la politique étrangère américaine. Toutefois, l’administration Trump considère le dossier biélorusse comme un cas commode : la libération de prisonniers est facile à « vendre » à l’électorat, tout en démontrant que les sanctions peuvent fonctionner lorsqu’elles sont appliquées de manière ciblée.
La nomination d’un envoyé spécial pour la Biélorussie institutionnalise le dialogue. Cela signifie que les échanges vont se poursuivre. Loukachenko en est conscient et a donc conservé une partie des prisonniers politiques pour l’avenir, en particulier ceux qui sont importants pour la Pologne et la Lituanie.
Potasse : victoire économique ou illusion ?
La levée des sanctions américaines contre Belaruskali constitue un succès important, mais encore incomplet. Sans accès aux ports européens, la potasse biélorusse reste prisonnière des contraintes logistiques. Les itinéraires russes sont surchargés et peu rentables. La Lituanie adopte une ligne dure. La Pologne attend des concessions politiques qu’elle n’a pas obtenues. En réalité, Minsk compte sur Washington pour imposer un transit via ses alliés ou proposer des alternatives. Des options existent, mais toutes exigent de nouvelles concessions de la part de Loukachenko. C’est précisément pour cette raison que les libérations devraient se poursuivre.
L’opposition : la fin du monopole de Tikhanovskaïa
L’un des principaux résultats de cet accord est la transformation de l’opposition biélorusse. Pendant cinq ans, elle a fonctionné selon un modèle pyramidal, avec un leader reconnu en la personne de Svetlana Tikhanovskaïa et une verticale politique rigide. Ce modèle est désormais en train de s’effondrer. Le retour de Babaryko et de Kolesnikova signifie l’émergence de centres de légitimité alternatifs, une rhétorique plus modérée et pragmatique, ainsi qu’une disposition à discuter d’un allègement progressif des sanctions.
Et après ?
Il est probable que les libérations se poursuivent, mais de manière graduelle ; que les sanctions soient levées partiellement ; que la Biélorussie reste un État autoritaire, tout en étant moins isolée sur le plan international ; et que l’opposition entre dans une phase de concurrence interne et de réévaluation de ses objectifs.